Les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) du grand ouest font appel à l’université de Poitiers pour bénéficier d’un accompagnement dans la formation en sécurité incendie des pompiers. Ils souhaitent ainsi bénéficier de l’expertise de la filière gestion des risques développée au sein de l’IRIAF à Niort et des recherches sur le comportement au feu des matériaux menées à l’institut P’ (université de Poitiers – CNRS – ISAE-ENSMA).

Mieux comprendre la science du feu, un enjeu vital

Contrairement à ce que l’on peut penser, les pompiers ne sont pas experts de la science du feu. Ils sont très bien formés et préparés aux techniques de manipulation des moyens de lutte contre l’incendie (lances, échelles…) mais beaucoup plus rarement à la compréhension scientifique des mécanismes liés à un incendie. De ce constat, est née en 2012, une première coopération entre le SDIS de Vendée et les chercheurs de l’Institut P’. « Ils souhaitaient être accompagnés dans la compréhension des phénomènes liés au feu afin d’intégrer les explications scientifiques dans leurs formations » explique Thomas Rogaume, professeur à l’Institut P’. « Il s’agissait de comprendre par exemple comment se produit un accident thermique, quelle est la toxicité des fumées, pourquoi cela peut se réenflammer… ». Ces informations sont vitales afin d’éviter les accidents. 75% des interventions des pompiers concernent les secours à personnes. Les incendies sont beaucoup plus rares, heureusement, mais de ce fait, les pompiers, notamment les plus jeunes, sont peu aguerris à la lecture du feu, l’anticipation de son évolution.

« La formation m’a sauvé la vie ! »

Pour montrer l’importance de ces formations, Thomas Rogaume se souvient d’une expérience en particulier : « dans le cadre des formations, nous expliquons des situations très concrètes. Notamment le cas d’un incendie au Québec connu sous le nom de l’accident « Capitaine Marleau » du nom du pompier décédé dans une tragédie à cause de la réinflammation de fumées froides. Nous montrons que les gaz présents pouvaient s’enflammer même à 20°C en présence d’une flamme pilote. Et un simple déblaiement d’un canapé se décomposant thermiquement doucement a amené une lame d’air générant son inflammation ainsi que celle des fumées. Et je me rappelle que quelques mois plus tard, un pompier qui avait suivi la formation et qui a du faire face à la même situation m’a avoué que la formation lui avait sans doute sauvé la vie ! ».

L’expertise de l’université de Poitiers largement reconnue

« Nous cherchons à comprendre comment se comporte un matériau quand il est soumis à des températures élevées » explique Benjamin Batiot, maître de conférences et chercheur à P’. « Nous avons ensuite développé notre compréhension des phénomènes à des échelles de plus en plus grandes jusqu’à l’analyse de conditions réelles : comment le feu se déplace dans une pièce, dans un bâtiment. Et c’est cette approche multi échelles qui a fortement intéressé les SDIS parce qu’on était capable d’interpréter les phénomènes qu’ils percevaient sur le terrain ». Après la Vendée, cette expertise vient d’être sollicitée par les différents SDIS du grand ouest (22, 29, 35, 44, 49, 53, 56, 72, 85) ce qui a fait l’objet d’une nouvelle convention avec l’université de Poitiers. Autre exemple de la reconnaissance des compétences de nos chercheurs, Benjamin Batiot a participé à la refonte des guides nationaux dans le cadre de la réforme de la formation incendie à l’échelle nationale pilotée par l’Ecole nationale supérieure des sapeurs-pompiers.

Un partage de connaissances et d’expériences

Pour Thomas Rogaume, cette collaboration est également très intéressante pour les chercheurs de l’université. « Travailler avec les SDIS nous permet de recueillir leur retours d’expériences sur des situations que nous ne pouvons pas connaître et parfois cela nous questionne sur notre compréhension des phénomènes ». Le partenariat permet également aux chercheurs de bénéficier des installations des pompiers pour leurs recherches. « Au laboratoire, nous pouvons travailler sur des échantillons relativement petits. Les SDIS nous donnent accès à des situations réelles. On a pu par exemple observer des feux d’entrainement réalisés dans des bâtiments voués à la destruction, et recueillir de nombreuses données intéressantes », précise le chercheur.

Un partage de connaissances et d’expériences

Les chercheurs ont participé à des entrainements de mise en situation dans des caissons enflammés afin de mesurer les contraintes que les pompiers subissent et déterminer les limites à ne pas dépasser.

 

De telles collaborations existaient déjà en France, mais pas à cette échelle et pas avec cette double approche formation / recherche. L’université de Poitiers se positionne ainsi comme un des acteurs référents en sécurité incendie au niveau national et comme un partenaire privilégié des SDIS.

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