Lauréat de l’appel à projet UP-Squared, le programme de recherche Prism-BD séduit par sa dimension interdisciplinaire. Une vingtaine de chercheurs de l’université de Poitiers ont décidé d’étudier les représentations des minorités politiques, sexuelles, religieuses et autres dans un média particulièrement populaire : la bande dessinée.

Fin janvier, le succès de fréquentation du festival international de la BD d’Angoulême a une nouvelle fois confirmé l’engouement du grand public pour la bande dessinée. 75 millions d’albums (mangas inclus) ont été vendus en France en 2023, soit une progression de 55 % en quatre ans. Désormais la BD entre dans tous les foyers, aborde tous les sujets de société et devient naturellement un objet d’étude pour la recherche. À l’université de Poitiers, la linguiste Laurie Dekhissi a eu l’idée d’étudier sous différents angles les représentations des minorités dans la BD. Comprenez minorités ethniques, religieuses, politiques, sexuelles… « Les minorités sont souvent stigmatisées, voire effacées dans les médias, or la BD est un média comme les autres maintenant, précise la spécialiste des variations d’usage du français. L’objectif est de savoir comment une minorité est mise en valeur dans une BD. Et plus largement, comprendre quelle place chacune d’entre elles a au sein de la société, comment elle est perçue et elle se sent considérée. »

 

Stéréotypes de genre : le sujet sensible

La dimension interdisciplinaire de ce programme de recherche baptisé Prism-BD est remarquable. Pas moins d’une vingtaine de chercheurs de l’université de Poitiers ont identifié un angle d’attaque en rapport avec leurs propres travaux. « Les stéréotypes de genre ont trouvé un écho dans tous les laboratoires », relève la linguiste membre de l’unité Forellis. Mais ce n’est pas tout. Les récits d’exilés intéressent des membres de Migrinter. Les historiens du Criham, les sociologues de Gresco, les psychologues du Cerca ont également trouvé du grain à moudre dans la BD. Tout comme les collègues de l’Institut d’études acadiennes et québécoises, ou encore ceux de Techné dans le domaine des technologies numériques pour l’éducation et du Mimmoc (Mémoires, Identités, Marginalités dans le Monde Occidental Contemporain). Réseau Canopé et la Maison des sciences de l’Homme et de la société (MSHS) complètent le tableau. « Certains vont davantage s’intéresser au contexte historique de la publication des albums, d’autres ont prévu d’interroger les auteurs. »

 

Réfléchir avec le grand public

Ce programme de recherche vient de décrocher un financement de 12 500€ dans le cadre du budget UP-Squared/France 2030. De quoi faciliter l’organisation d’un colloque international en novembre et acquérir des ouvrages pour alimenter la Bédéthèque de la MSHS gérée par Rodolphe Defiolle. Grâce à cette enveloppe, des auteurs vont aussi animer des ateliers au Toit du Monde avec un public en majorité d’origine étrangère et à l’école élémentaire Alphonse-Bouloux. « On va réfléchir avec eux à des thématiques qui les concernent au quotidien, c’est aussi le rôle de l’université », conclut Laurie Dekhissi.

 

À coup sûr, les résultats de ces recherches seront scrutés par la communauté scientifique à commencer par les membres du Réseau régional de recherche en BD créé à Poitiers en 2020, et par les étudiants du master BD.

 

Laurie Dekhissi, porteuse du projet et Rodolphe Defiolle, gestionnaire de la Bédéthèque de la MSHS ©RMédiation

 

 

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