Pourquoi avoir choisi de travailler sur la notion de police administrative ?
Il faut d’abord se mettre d’accord sur la définition de police administrative. C’est un sujet large qui peut englober des mesures aussi variées que la fermeture des bars, les mesures de lutte anti-terroriste ou encore de couvre-feu et de confinement que nous connaissons depuis la pandémie de COVID-19. L’administration agit et pose des règles pour préserver l’ordre public, c’est-à-dire garantir la sécurité, la salubrité, la santé, et la tranquillité du public. On distingue la police administrative de la police judiciaire qui s’occupe de constater les différentes infractions à la loi pénale. Aujourd’hui, la police administrative est en pleine évolution : ce sont ces changements que j’étudie. J’ai d’abord commencé à travailler sur la notion d’ordre public, qui est le but de la police administrative. En échangeant avec François Brenet, mon directeur de thèse, j’ai élargi le sujet vers la police administrative pour ne plus seulement m’intéresser au but mais aussi au »comment » : car la grande question, c’est de savoir quelle police nous voulons, ce qui est un sujet fondamental dans une démocratie.
Ce sujet est presque toujours d’actualité car l’administration doit s’adapter en permanence. On peut le voir notamment avec les mesures du plan Vigipirate ou COVID-19 : si celles-ci viennent à se contredire, on arrive à des questions inédites. Nous avons peu de recul sur ces nouvelles règles, les travaux de recherche sur ce sujet n’en sont qu’à leurs débuts. Cela peut parfois rendre le travail plus difficile puisqu’à tout moment une nouveauté peut le remettre en cause.
A quoi ressemble votre environnement de travail ?
Je travaille au sein du laboratoire IDP (Institut de Droit Public) qui compte une trentaine de doctorants et une vingtaine d’enseignants chercheurs. Il est co-dirigé par le Pr. Anne-Laure Girard et le Pr. François Brenet, qui est aussi mon directeur de thèse. C’est avec lui que j’échange le plus, il m’aide pour orienter le sujet, le plan, donne des conseils pour réécrire… Le travail de doctorant peut être assez solitaire, on est en effet seul face aux documents et aux enjeux, mais le directeur de thèse valide, donne ses éclairages, soulève des hypothèses et occupe une place centrale dans le déroulement de ma thèse. J’aime me rendre au laboratoire, cela me permet d’être en contact avec des collègues et d’échanger avec eux. J’en profite pour travailler à la bibliothèque même s’il existe énormément de ressources en ligne qui permettent de travailler à distance.
Parallèlement, je dispense des travaux dirigés grâce à mon statut, puisque j’ai un contrat doctoral. Cela me semble essentiel pour deux raisons. D’abord il est indispensable d’avoir une première expérience d’enseignement puisque mon objectif professionnel, à terme, est de devenir enseignante-chercheuse. Ensuite, la recherche ne peut pas se concevoir sans enseignement. Le droit s’applique à tout le monde, et en ce qui concerne mon sujet de thèse, tout le monde est concerné par la police, et plus largement, tout le monde aura un jour affaire à l’administration. Enseigner les règles qui régissent les relations entre celle-ci et les personnes, informer à la fois le grand public et les futurs juristes qui feront peut-être de même par la suite, cela me semble naturellement lié à mon activité de recherche.
Et si c’était à refaire ?
Je savais dès le master que je voulais faire une thèse. C’est une chance incroyable de pouvoir se consacrer, au moins pour trois ans, à une seule question et de l’approfondir au maximum. Je travaille surtout l’aspect juridique mais la police est un sujet largement traité par d’autres disciplines comme la sociologie, les sciences politiques, l’histoire du droit… En outre cela permet de nouer des dialogues avec d’autres chercheurs et s’il est possible que nous arrivions aux mêmes conclusions, le cheminement pour y parvenir est différent.
Je dois concilier mon travail de thèse avec les cours que je donne : préparer les TD et corriger des copies tout en avançant sur mes recherches. C’est parfois compliqué, on peut se sentir un peu seul dans son travail et il y a des périodes au cours desquelles il est plus difficile d’avancer. Pourtant cela reste une expérience incroyablement enrichissante et je prends énormément de plaisir à faire ce que je fais, car j’ai la possibilité de me dédier entièrement et sur une longue durée à un sujet qui me passionne.